7 septembre 2018

Wabi-Sabi
Rero

Walter Editions 49 Rue du Montparnasse
Paris (FR)

Contact

© Nicolas Couturieux

Trait d’humour amer sur papier japonais, Wabi-Sabi renvoie à l’esthétique du même nom qui prône un retour à la simplicité, à la sobriété. L’on pense à celle, heureuse, de Pierre Rhabi, qui s’offre comme une alternative à la course effrénée au consumérisme et au délicat compromis entre l’être et l’avoir qui se pose comme l’une des difficultés majeures de la pensée occidentale.

À l’heure où la réinvention de notre mode de vie devient une urgence, cette impression pose la question d’un compromis peut-être impossible : celui de conserver son mode de vie, de veiller à son confort, tout en garantissant la responsabilité de ceux-ci et limiter son impact négatif sur l’environnement.

Un personnage de fiction apparaît entre ces lignes, barrées comme pour montrer l’impasse d’une telle affirmation : un être formaté (au sein de l’une des polices d’écriture les plus communes, Verdana) dont l’idéal de bonheur est celui, conforme, commun, construit autour de la possession matérielle et de la sécurité qu’elle induit. Un personnage las, qui a répondu à tout ce qu’on lui demandait, qui a trouvé sa place dans la société sans pour autant s’y être épanoui. Un personnage que la reconnaissance semble à peine satisfaire, dont le temps est consacré à gagner de l’argent par ailleurs dépensé.

Quel est ce bonheur ?
Est-ce réellement celui de l’individu, qui n’a pas seulement réussi dans la vie mais qui a réussi sa vie, qui s’est réalisé ? Est-ce celui, devenu tyrannique, que l’on est censé atteindre dès lors que l’on y oeuvre ? Celui qui semble si simple à atteindre, car relevant de notre responsabilité seule, comme s’il était étranger à l’injustice sociale ?

«J’AI DÉJÀ TOUT. NE ME DEMANDEZ PAS EN PLUS D’ÊTRE HEUREUX» comme la formulation d’un ultime effort impossible, d’une énergie disparue, d’un abandon. Les points de suspension comme un soupir.
Le lettrage vient envahir l’espace de la fine feuille de papier artisanal, semblable à un washi. Issue de la main et de son savoir-faire, extraite de la production littéraire de masse, cette impression est unique et fait oeuvre.

Le texte et sa densité semblent s’être déposés là comme pour trouver le repos.

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